Edmond JABES. "MARIA ELENA VIEIRA DA SILVA"

(Doc. n° 28).

 

Lien avec le texte

 

 

Proposition de plan pour rendre compte du texte sous la forme d’un commentaire composé/lecture méthodique. Le texte de Jabès est généré, en particulier, par une toile précise à laquelle on accèdera en cliquant ci-dessous.

 

[Vieira da Silva : Jardins suspendus, huile sur toile, 162 x 113,5 cm, 1955, © Musée National d’Art Moderne, Centre Georges Pompidou, Paris]

 

 

q       Une toile qui résiste

 

§         Noter en premier lieu l’"inflation" des "?" (6 occurrences) qui témoigne précisément des questions que soulève l’œuvre abstraite (!) de l’artiste.

§         Première question posée : "Y a-t-il ? " avec une réponse qui ne vient pas réellement : "Il y avait (imparfait)". Introduction d’une réponse "déviée", ainsi que de la dimension temporelle dans l’espace de la toile. La vraie réponse n’interviendra qu’à la fin du texte. Et encore ! : "de ‘il y avait’ à ‘il y a’ tout le trajet de Vieira da Silva".

§         Repérage d’un champ lexical qui dit vide et impuissance : "absence" ; "réalité autre" ; "rien" (5 occurrences, dont 4 en qualité de substantif) ; "transparence" ; "insaisissable"...

§         Difficulté à trouver le mot qui rende exactement compte : "comme un édifice"  (c’est-à-dire : "pas tout à fait" un édifice...). Nous y reviendrons.

§         Un détour par le titre de la toile semble nécessaire (les mots à la rescousse !) : "Jardins suspendus". Adéquation ? Inadéquation ? Il faudra relire la légende (cette "re-lecture" témoigne encore de la difficulté à appréhender la toile).

§         "Qu’est-ce qui a été saisi de cet insaisissable ?" Constat d’échec ? On a au moins la mise en évidence d’un parcours et d’un "trajet" de l’artiste. La toile s’en trouve-t-elle davantage élucidée ?

 

 

q       Des mots pour la dire (l’écrire) ?

 

§         "Une réalité autre". Sommes nous vraiment renseignés ?

§         On passera par le regard (champ lexical à repérer). Faire confiance au regard.

§         On distingue "comme un édifice". Le langage va apprivoiser l’objet. Il "tourne autour". Autres mots retenus : "transparence" ; "miroir" ; "brisures"... Avec une logique d’associations d’idées : on passe de la transparence de la vitre au miroir (cf. Tardieu : "Le miroir ébloui"), puis au miroir qui se brise. Et les brisures permettent de rendre compte assez précisément de la réalité picturale de Vieira da Silva. A comparer avec les approches de Tardieu (dont doc. n° 29).

§         Apparente cohérence : "traits d’oubli", "l’oubli a sa mémoire", "la mémoire du rien", "le rien sur lequel repose l’édifice"... Le cercle est bouclé. 

§         Recours au titre/légende ou les mots au secours de la toile qui résiste et déroute (par quelle porte entrer ? Cf. Tardieu  : "les portes de toile"). Qu’a-t-elle à nous dire ? Avec récupération des éléments antérieurs. Cohérence de la démarche d’appropriation. Cf. Butor : Les mots dans la peinture.

§         Connotations d’odeurs (synesthésies). Le lecteur pourra songer aussi aux Jardins de Babylone que da Silva avait probablement en tête, du moins en donnant son titre. Un texte qui fait appel à nos sens. Un texte hommage de Tardieu s’intitule : "Passerelles de Babylone". Rêverie.

 

 

q       De la rêverie au poème

 

§         Un texte/poème né du silence de la contemplation de l’œuvre (on notera les références plus ou moins explicites à la toile et à la "manière" de Vieira da Silva).

§         Hermétisme de la toile, hermétisme du texte ? On se rappellera les propos de Saint-John Perse disant que la poésie en elle-même n’est pas obscure mais qu’elle est au service de domaines obscurs qu’elle a pour mission d’élucider. "L’obscurité qu’on lui [la poésie] reproche ne tient pas à sa nature propre, qui est d’éclairer, mais à la nuit même qu’elle explore, et qu’elle se doit d’explorer : celle de l’âme elle-même et du mystère où baigne l’être humain. Son expression toujours s’est interdit l’obscur, et cette expression n’est pas moins exigeante que la science. "  (Discours de Stockholm, 1960).

§         Texte éclaté qui tend à coller au mieux à la toile qu’il évoque : phrases de diverses longueurs, souvent nominales (comme des touches de couleurs ou des traits de pinceau !). Réfléchir à l’adéquation entre les caractéristiques stylistiques du  texte et la technique mise en œuvre par Vieira da Silva.

§         Une libre exploration utilisant les associations d’idées (= liberté de la rêverie)

§         Un poème épitaphe (cf. date de composition à vérifier) ? On en relèvera les "marques".

-          un titre qui ressemble à un alexandrin avec assonances intérieures en [a] : "A-Ma-ria-E-le-na / Vie-i-ra- da- Sil-va".

-          présence de versets (plutôt que de vers).

-          travail sur le lexique et la syntaxe (repérages à faire).

-          jeux de sonorités (reprises anaphoriques) et de rythmes (binarité, ternarité). Etc.

 

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